Driss El Kesri et les rédacteurs d’un journal le Papotin

Utopsy - clinique et politique - fait sa rentrée le lundi 14 octobre à 20h30 au 27 rue des Bluets Paris 11ème (métro père Lachaise ou Ménilmontant, entrée libre et gratuite).

Dans un contexte social et politique marqué par le déploiement toujours plus « décomplexé » de discours ségrégatifs et discriminatoires (les récents discours sur les Roms en étant la pointe émergée), la dimension politique de notre activité de praticiens de la folie (ou de la psychiatrie, du handicap, de la précarité, de la différence), activité qui nous confronte forcément aux questions de l’exclusion et de la relégation, ainsi qu’à celles de la dignité et de l’accueil, nous semble particulièrement interrogée.

Pour débuter cette année, nous recevrons les rédacteurs d’un journal « atypique » : le Papotin, ainsi que le rédacteur en chef de ce journal : Driss El Kesri.

Que signifie « atypique » ? Chaque personne participant à ce journal a probablement sa réponse. Selon un des concepteurs du journal, « atypique » signifie : « différence acceptée ».

Le Papotin est un journal qui existe depuis plus de 20 ans et compte déjà une trentaine de numéros. Il est né d’une proposition de Driss El Kesri, alors qu’il travaillait à l’hôpital de jour d’Antony, accueillant des jeunes présentant des symptômes autistiques et apparentés, d’écrire sous la dictée de ces jeunes tout ce qui leur passerait par la tête et qu’ils auraient envie de voir retranscrit.
De cette idée initiale est née celle de la création d’un journal, publié régulièrement, qui s’articulerait autour de deux éléments : des textes rédigés à partir des écrits ou des paroles des rédacteurs et des interviews de personnalités politiques, artistiques, médiatiques, réalisées par ces rédacteurs et retranscrites ensuite.

Les rédacteurs du Papotin forment un groupe hétérogène puisqu’il réunit des patients de différents hôpitaux de jours, des usagers d’IME et d’ESAT, des résidents de Foyers de vie ou de Foyers d’accueil médicalisés de la région parisienne, des accompagnants de ces personnes travaillant dans les institutions qu’elles fréquentent, ainsi que quelques personnes qui ne sont pas issues du milieu de la prise en charge spécialisée mais ont croisé le chemin du journal et sont devenus des rédacteurs du Papotin.
Le comité de rédaction du journal se réunit chaque semaine dans un théâtre parisien, en dehors du cadre des institutions dont sont issus la plupart des rédacteurs du journal, dans le but de produire le contenu du journal. Les interviews ont également lieu dans ce cadre. Cette élaboration s’effectue à partir d’une discussion libre où la parole de chacun a son importance. Le journal se reconnaît deux parrains : Howard Buten et Marc Lavoine.

Le Papotin est totalement inscrit dans l’actualité sociale et politique, interviewant des personnes comme Cécile Duflot, Stéphane Hessel, Jacques Chirac, monseigneur Gaillot, la chanteuse Lorie, etc…

La question de la norme, de la différence, de l’exclusion, de l’hétérogène, du ressenti intérieur des rédacteurs est centrale, comme en témoignent ces extraits d’interviews :

David S (parlant de l’ESAT Turbulences dont il est usager) : C’est un endroit où on se fait montrer du doigt car tout ce qui n’est pas dans la norme se fait montrer du doigt. Les gens qui sont aux Chapiteaux sont autistes ou ont différents problèmes. On essaie que tout ce monde se mélange (on va dire cela entre guillemets) se mélange dans le sens cohabite, communique, mais de la façon la plus harmonieuse. Pour résumer, ce qui n’est pas simple, je dirai : c’est un endroit où l’on essaie tant bien que mal de s’adapter au désir de l’autre.

La chanteuse Camille : on est en lutte pour être « normal » tout le temps… […] c’est ça qui est problématique, c’est l’exclusion, alors que la différence est une richesse en fait. La norme ce n’est pas être tous pareils, c’est vivre ensemble ! La norme ce n’est pas la pureté, ce n’est pas l’homogénéité… Il faut que les choses soient à l’image des êtres vivants, c’est-à-dire plein de variétés d’êtres vivants différents, des visages différents, parfois des pathologies, des défauts, des visages différents…

Mais ce qui structure tout aussi fortement le Papotin, c’est la fantaisie omniprésente, la drôlerie, qui donne au lecteur une jubilation particulière, salutaire, celle que l’on ressent lorsque les règles sociales sont démasquées, lorsque le langage est décalé de ses conventions habituelles.

Nous sommes donc très heureux de débuter cette année du séminaire d’Utopsy avec le Papotin et espérons vous accueillir nombreux à cette soirée.

Utopsy
www.utopsy.fr

Vous pouvez d’ores et déjà prendre note des rendez-vous suivants :

Le lundi 18 novembre 2013 nous recevrons Sandra Alvarez de Toledo, responsable de la maison d’édition L’Arachnéen, qui édite des oeuvres autour de l’expérience de Fernand Deligny. Elle interviendra notamment autour de la parution récente de deux ouvrages : Cartes et lignes d’erres et Le Journal de Janmari.

Le lundi 16 décembre 2013, Olivier Apprill, rédacteur en chef d’Arte-Magazine, auteur de documentaires radiophoniques et psychanalyste interviendra dans le contexte de la parution de son livre édité en 2012 sur le GTPSI, Une avant garde psychiatrique : le moment GTPSI (1960-1966).

Régine Pratt, psychanalyste interviendra le lundi 20 janvier 2014 autour de la clinique mère-bébé et d’Esther Bick.

Le mardi 11 mars 2014 Joëlle Oury, psychiatre interviendra autour de son ouvrage Daniel H. La modeste contribution d’un pâtissier à l’équilibre terrestre paru aux éditions Hermann en 2013.

Le lundi 31 mars 2014 nous recevrons Albert Moreau, psychiatre exerçant à Clermont dans l’Oise qui interviendra autour du secteur infanto-juvénile : utopie, histoire, pratique.

Nous aurons aussi le plaisir de recevoir au printemps 2014 (les dates vous serons transmises prochainement) : Yacine Ahmis, Benoit Eyraud, Jean Max Gaudillière et Françoise Davoine, François Pain
Et à la rentrée 2014 interviendront Alain Badiou, Laure Murat...

L’entrée est libre et gratuite.